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Lutte anticorruption en France : 10 ans de stagnation

Affaires - Pénal des affaires
25/01/2022
L’organisation non gouvernementale (ONG) Transparency International a publié son Indice de Perception de la Corruption pour l’année 2021. Il révèle la grande stagnation de la France dans sa lutte anticorruption.
Les raisons de l’immobilisme français dans la lutte contre la corruption
 
CJIP, AFA, PNF : les avancées du mandat 2012/2017
 
L’Indice de Perception de la Corruption (IPC), qui classe les pays en fonction du degré de corruption perçue dans les administrations et la classe politique, fait appel à « des données sur la corruption, tirées de sondages d’experts réalisés par divers organismes indépendants ».
 
Le bilan de l’année 2021 démontre qu’en France, la lutte contre la corruption n’a pas progressé depuis dix ans. Plus inquiétant encore : le pays n’a jamais retrouvé son plus haut classement à l’IPC, en 2005, et a perdu quatre places dans le classement sur les dix-sept dernières années. L’ONG explique cet immobilisme par le fait que chaque progrès soit annulé par un recul ultérieur. Difficile de nier, en effet, les avancées en matière de lutte anticorruption, comme en témoigne la création de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), de l’Agence française anticorruption (AFA), du Parquet national financier (PNF), l’instauration de la Convention judiciaire d’intérêt public (CJIP), ou encore la mise en place d’un statut protecteur des lanceurs d’alerte, d’ailleurs salués par l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) dans son rapport d’évaluation, en décembre dernier.
 
Une dynamique entachée par des reculs
 
Oui, mais. Tous ces efforts, estime l’ONG, sont amoindris par « les nombreux reculs et signaux inquiétants enregistrés sur la période » des cinq dernières années.
Ainsi en est-il des nombreuses attaques subies à la fois par le PNF et les associations de lutte anticorruption, mais aussi, pointe l'organisation, du « nombre de membres de gouvernement mis en cause dans des affaires d’atteinte à la probité ».
 
Autre motif d’inquiétude : le manque de moyens, mais aussi d’indépendance, des acteurs de la lutte anticorruption. Et Transparency International France de pointer les 18 magistrats et 7 assistants spécialisés du PNF, pour les quelques 600 affaires dont il est chargé. Quant à l’AFA, il est reproché la tutelle des deux ministères, justice et budget, pour dénoncer le manque d’indépendance, déjà pointé dans le dernier rapport du GRECO (Groupement d'États contre la corruption).
 
Enfin, pour le président de Transparency International France, le renoncement du pays à se saisir de la question du lobbying témoigne d’une absence de volonté politique, alors que le journalisme d’investigation contribue pourtant à une meilleure connaissance de la réalité de la corruption.
 
Et ailleurs dans le monde ?
 
Une stagnation ou une détérioration dans la majorité des pays
 
Avec un score de 71 (zéro correspondant à un système très corrompu et 100 à un système très faiblement corrompu), la France se classe 22e sur 180 et gagne une place et deux points par rapport au classement et au score de 2020. Si elle ne parvient pas à poursuivre sur sa dynamique prometteuse initiée quelques années plus tôt, elle n’est pas la seule à afficher cette stagnation : en tout, ce sont 131 pays qui n’ont pas fait de progrès significatifs.
 
Sur la dernière décennie, le contrôle de la corruption a stagné, voire s’est détérioré dans 86% des pays. Le Canada, le Nicaragua, ou encore le Honduras affichent les plus grosses chutes dans l’indice.
 
Le Soudan du Sud, la Syrie et la Somalie clôturent le classement.
 
Les bons élèves du classement
 
Dans le peloton de tête : le Danemark, la Finlande, la Nouvelle-Zélande, suivis de la Norvège et Singapour.
L’Arménie, avec ses manifestations de 2018 qui ont ouvert la voie à davantage de libertés civiles, l’Angola ou la Corée du Sud se démarquent quant à eux par des progrès très significatifs.
Source : Actualités du droit